Monsieur Raynald Pelletier, membre du Conseil d’administration de l’arrondissement Vanier-Les Rivières, à Québec et président du CAPVISH (Comité d’action des personnes vivant des situations de handicap) est très actif dans la défense et la promotion des droits des personnes à mobilité réduite de la région de Québec.
C’est avec beaucoup de générosité qu’il a partagé ses expériences de vie en fauteuil roulant et a répondu à nos questions.
« J’ai décidé que le bonheur rentrait chez nous et qu’il n’en sortirait plus! »
Raynald Pelletier
1- Monsieur Pelletier avez-vous toujours été en fauteuil roulant?
Non, j’ai marché pendant 21 ans. Ma situation physique s’est détériorée à la suite de plusieurs interventions chirurgicales.
2- Quelles sont les principales contraintes que votre fauteuil roulant pose dans votre vie quotidienne?
J’ai toujours pensé que je n’étais pas handicapé, je vis des situations de handicap, c’est très différent. C’est la vie qui n’est pas adaptée: des trottoirs de 10 cm, des escaliers comme seul accès à certains bâtiments, les salles de bains dans les lieux publics, comme les restaurants…
Si on appelle avant d’y aller pour vérifier si la salle de bains est adaptée, on se rend compte que les gens ne font pas la différence entre accessible et adapté. Même si on peut entrer, ça ne veut pas dire qu’on pourra l’utiliser: le distributeur de savon, le séchoir à main, la hauteur du lavabo, etc… L’accessibilité pour les personnes handicapées est un réel problème!
3- Qu’est-ce que votre fauteuil roulant implique dans votre vie professionnelle?
J’ai travaillé dans des endroits très différents au cours de ma vie. Mais j’ai surtout travaillé dans des organismes communautaires qui œuvrent pour l’intégration des personnes handicapées au Québec. Je travaille notamment pour le CAPVISH depuis une vingtaine d’années, et j’en suis devenu président il y a 5 ans.
Selon moi, mon handicap n’a pas posé de problème particulier dans ma vie professionnelle. Tout est une question d’attitude : si vous voyez votre fauteuil comme un problème, les autres le verront comme ça aussi; si vous n’en faites pas de cas, ils n’en feront pas non plus.
4- Diriez-vous que vos employeurs se sont montrés accommodants?
Oui, comme je le disais, j’ai toujours eu une attitude positive. Et quand on est gentil et bienveillant envers les autres, les gens sont portés à nous aider et à faire preuve de tolérance.
5- Votre handicap a-t-il été un frein dans l’avancée de votre carrière?
Oui. Mais pas à cause de mon moral ou de ma volonté. J’ai subi 51 chirurgies au cours de ma vie. Aucun employeur n’accepterait des absences de 2 à 3 mois par année, c’est logique.
6- Le monde est peu accessible et adapté aux personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap. Selon vous, comment pourrait-on améliorer la situation?
Les gens sont peu conscientisés. Par exemple, les architectes devraient se conformer aux normes d’accessibilité universelle, ce serait un gros pas pour les nouvelles constructions.
Pour les anciennes constructions, c’est moins évident car il faut conserver le patrimoine. Mais avec de la bonne volonté, on pourrait améliorer considérablement les choses.
7- Diriez-vous qu’il existe certains mythes autour de la situation des personnes à mobilité réduite?
Beaucoup! Les gens ont beaucoup d’idées préconçues à notre sujet.
Par exemple, on a l’impression que les personnes handicapées n’ont pas de vie sexuelle, c’est loin d’être vrai. Nous avons une sexualité comparable à celle de n’importe qui.
On a aussi l’impression que les personnes en fauteuil roulant sont pauvres, tristes, et même qu’elles ont automatiquement un déficit intellectuel.
On pense aussi souvent qu’on manque d’autonomie. Je pense que beaucoup de personnes à mobilité réduite n’utilisent pas leur plein potentiel, pour des raisons différentes. C’est pour ça que certains nous croient impotents dans plusieurs aspects de la vie. Ce qui est loin d’être le cas!
Merci à Monsieur Pelletier d’avoir fait preuve de cette ouverture et de cette transparence. Il est fort à parier que cette attitude amènera bien du monde à ne plus seulement voir un fauteuil roulant, mais plutôt essayer de connaître la personne qui est assise dedans et sans préjugé.